Derrière la porte du psy

Les 5 questions qu'on se pose avant de la franchir.

09 Novembre 2017

Le mot « psychothérapie » est fortement connoté. Les idées reçues sur les troubles psychologiques et les amalgames persistants entre psychologie et folie, font que ce traitement des plus naturels, sans chimie, qui aide des millions de personnes, est parfois stigmatisé. S’ils persistent de nombreux mystères, c’est surtout de grands fantasmes qui planent sur ce qui se passe derrière la porte du cabinet du psy. C'est souvent une expérience qui est perçue comme mystérieuse et déroutante et ce sont les mêmes questions qui reviennent:

Comment parler avec un psy va-t-il vraiment m'aider?

Est-ce que je vais devoir raconter ma vie à une personne qui ne parle pas ?

Combien de temps ça dure ? (autrement dit « combien ça va me coûter ? »)

Prendre des médicaments ne serait-il pas plus efficace?

Mon psy va-t-il me juger ou essayer de me contrôler?

Comment parler avec un psy va-t-il vraiment m'aider ? 

Boris Cyrulnik, neuropsychiatre français, rapporte dans son livre "De chair et d'âme", la démonstration de l'effet biologique de la parole. "L'effet affectif de la parole, en entraînant des émotions de chagrin, de joie, de surprise ou d'apaisement, induit lui aussi des modifications biologiques". Il rapporte qu’une expérience a été faite sur 30 patients dépressifs. Dans un premier temps, au début de leur dépression,  ils ont tous subi une IRM qui a démontré qu’ils avaient tous un hippocampe intact. Ces 30 personnes se sont partagées en 2 groupes : un groupe a choisi de ne suivre aucun traitement (ni chimique, ni accompagnement psy), et l’autre a accepté de suivre une psychothérapie en parallèle d’un traitement par médicament.

Un an plus tard, dans le premier groupe, chez les sujets qui souffraient encore de dépression, on a identifié une réduction significative des cellules de l’hippocampe, alors que chez ceux qui avait parlé et parfois pris des médicaments on ne constatait pas d'atrophie. 

Boris Cyrulnik explique : « L'interprétation biologique et psychologique de ces images est aujourd'hui possible: ceux qui ont souffert sans pouvoir maîtriser leurs émotions ont sécrété trop de cortisol de manière chronique. Les parois des cellules hippocampiques, très sensibles à cette substance, sont devenues oedématisées. Les canaux dilatés de la paroi ont laissé entrer trop de calcium qui, en inversant le gradient ionique, a gonflé les cellules jusqu'à l'explosion. A l'opposé, ceux qui ont maîtrisé l'émotion avec l'aide d'un psychothérapeute, en faisant des récits et des théories pour tenter d'analyser les raisons de leur souffrance, sans ruminer, c'est à dire en prenant une distance et en établissant une relation affective avec un autre, ont appris à maîtriser leur malaise, peu à peu, mot à mot, affect après affect, molécule après molécule, ce qui a diminué leur taux de cortisol et évité de faire exploser les cellules de l'hippocampe. »

La fonction de l’hippocampe est importante. Cette structure cérébrale est notre centre médiateur entre nos expériences passées et l’action adéquate à poser au moment présent. Elle a donc un rôle essentiel dans notre capacité à mettre en place la réponse ou l’action à la plus approprié à un moment donné, en fonction de notre histoire. L’hippocampe a cette capacité à analyser et recouper toutes les infos pour définir la réaction qui semble la mieux adaptée pour nous.

« L'effet magique de la parole s'explique par la biologie! » conclut le neuropsychiatre.

Est-ce que je vais devoir raconter ma vie, allongé sur un canapé, à une personne qui ne parle pas ? 

Il s’agit là d’une vielle image caricaturale du psy qui a le cuir dure. Cette façon de pratiquer est, de mon point de vue, tout à fait périmée et obsolète. Elle remonte au siècle dernier, même si elle est encore véhiculée par de nombreux films et sketchs et peut être pratiquée par certains psys. Pour vous donner une autre idée de la nature de l’échange avec un thérapeute et dépoussiérer l’image du psy taiseux à lunettes, je vous invite à voir le film « Oui, mais… » de Yves Lavandier. 

Combien de temps ça dure ? 

C’est une question difficile… Et le pronostic du nombre nécessaire de séances, même après un entretien préalable, est strictement impossible. Tout dépend de la problématique et des résistances du patient…  Parfois il faut faire bien des détours pour parvenir à Soi... En général, un mieux-être apparaît dès la première séance. Il s’agit du mieux-être de se sentir écouté, compris et accompagné. Ensuite l'apaisement se fera ressentir au fil des séances. L’engagement, l’implication et la qualité de la relation avec le thérapeute sont les principaux garants de la réussite d’une thérapie

La fréquence dépend surtout du patient. Il est préférable d'espacer les rendez-vous d'au moins une semaine, de sorte à bien assimiler les informations qui permettent de résoudre la problématique. Mais tout cela est vraiment lié à la problématique et aux capacités de chaque patient...

Réfléchir à la possibilité de suivre une thérapie ne demande pas d'engagement fort (sinon celui de venir en séance régulièrement) et il est tout à fait possible de faire quelques séances puis décider ensuite si le thérapeute convient ou non et si une thérapie est vraiment nécessaire. Aller en thérapie à contre cœur, à reculons ou pour faire plaisir à quelqu’un (parents, conjoint, …) est inutile et complètement inefficace.

Quant à la question « combien ça va me coûter ? », la dépense se limitera à la valeur que vous vous donnez.

Prendre des médicaments ne serait-il pas plus efficace? 

Les médicaments rétablissent artificiellement un équilibre chimique qui donne la sensation de l’équilibre psychique que le sujet n’est plus capable de créer naturellement. S’ils sont tout à fait indiqués en début de thérapie (dans les cas de dépression sévère et burn-out) pour pouvoir aborder sereinement le travail, la nécessité des médicaments disparaîtra au fur et à mesure de la thérapie quand le patient réinstallera lui-même naturellement un véritable équilibre psychique. 

Mon psy va-t-il me juger ou essayer de me contrôler ? 

Un psy obéit à une éthique et à une déontologie qu’il doit ouvertement afficher (sur son site internet ou dans son cabinet). L’objectif d’un psy doit être, de mon point de vue, d’amener son patient à l’autonomie de pensée, de choix, et d’action. A travers l'écoute et le dialogue, le travail du thérapeute est d'amener la personne à prendre conscience de sa problématique et de ses propres ressources de sorte à les mobiliser pour mieux vivre la situation, et trouver sa propre solution. Certains thérapeutes proposent des activités parallèles parfois complémentaires à la thérapie (théâtre, méditation, groupes de parole, ateliers divers, …). Le patient doit rester libre d’y participer ou pas, et ces activités ne doivent pas être présentées par le thérapeute ou/et ressenties par le patient comme obligatoires.

Si malgré tout, des questionnements ou des résistances persistent, vous pouvez peut-être vous poser une seule question : 

"Quelle est la pire chose qui pourrait m’arriver si je donnais une chance à la thérapie ?"