Aide-toi et le ciel t'aidera

Démonstration

16 Septembre 2019

 « J’voulais t’parler de ma vie, c’est rare quand ça m’arrive… »

J’emprunte ces mots à Jean Jacques Goldman pour, une fois n’est pas coutume, écrire un article étayé par mon expérience personnelle. Ceci dit, ceux qui me connaissent ou s’intéressent à mon travail, savent déjà qu’en qualité de psyplette, je n’enferme pas hermétiquement ma vie personnelle derrière le masque du psy

Je ne fais pas de secret de mon cursus professionnel. A 37 ans, embarquée dans une carrière productive et prometteuse de cadre dans le Bâtiment, j’ai pris conscience de ma profonde insatisfaction et de mon besoin d’exercer une profession «humainement utile». Fascinée par la psychologie depuis ma première psychothérapie à l’âge de 20 ans, j’ai décidé de retourner à l’école pour être formée à l’accompagnement psychologique et à la relation d’aide

C’est une très sérieuse décision que de renoncer à une carrière « rémunératrice », aussi insatisfaisante soit-elle, quand on a par ailleurs des engagements familiaux et financiers en cohérence avec ce niveau de rémunération. Mais, au-delà de la peur, je suis de celles qui se disent que « derrière chaque volonté il y a un chemin », et je sais que je suis travailleuse, courageuse, pleine de ressources et vaillante (dixit mon grand-père paternel) donc je me lance…

Très vite, je me réjouis de cette décision. J’adore retourner à l’école, j’adore ce qui y est enseigné, réviser pour l’examen est une partie de plaisir, l'examen une formalité. Je me sens tellement à ma place. Ça y est, je sais enfin ce que je veux faire quand je serai grande !

Juste diplômée, j’ouvre mon cabinet à Fontenay le Comte et je communique. Je commence tout de zéro : personne ne me connait (je ne vis pas à Fontenay le Comte), il y a tout à défricher et construire. Ce n’est pas parce qu’on ouvre son business, qu’on met son site en ligne que le client saute sur son téléphone et vous appelle. L’agenda est loin d’être rempli et j’ai besoin «pratiquement» de compléter mon activité par une activité « alimentaire » à temps partiel. J'en trouve une rapidement.

De nature curieuse et enthousiaste, cette activité me plait dans les premières semaines.Je découvre plein de choses, je suis stimulée intellectuellement, je fais de nouvelles connaissances, ma vision du monde s’agrandit.

Mais au bout de quelques mois la lune de miel est terminée. La situation devient de moins en moins idyllique, voire carrément douloureuse. Je vais à ce travail remplie d’appréhensions : je suis confrontée à des injonctions contradictoires, je ne me sens pas soutenue par ma hiérarchie, le tout dans un environnement où la violence verbale est omniprésente et "normalisée". 

Un jour, c’est l’événement de trop. Je rentre chez moi un soir et c’est fini, je n’y remettrai plus les pieds. Je n’en peux plus de collaborer à ce système. Je ne veux plus être bafouée, humiliée, discréditée, agressée, c’en est trop. Je suis tellement déterminée que pour la première fois de ma vie j’envisage même sérieusement l’abandon de poste si c’est la seule solution pour en sortir.

Pourtant, si l’activité du cabinet s’est densifiée en 18 mois, elle n’est pas encore viable. 

Une personne de ma famille proche, à qui je témoigne de ma souffrance et de ma décision, me le fait d’ailleurs bien remarquer et me met en garde qu’en démissionnant je n’aurai pas d’allocation chômage, qu’abandonner mon poste « ça me suivra » et on ne sait pas de quoi l’avenir est fait... Je lui parle de ma souffrance, et elle me répond argent et m'envoie ses propres peurs ! Je n'ai ni besoin, ni envie d'entendre ça.  

Mon ami, chef d’entreprise depuis plus de 20 ans et d’un tempérament plutôt rationnel et pragmatique, me dit « Depuis le temps que tu supportes ça et que tu le dis, ça devait arriver. Tu n’as pas fait tout ce chemin pour souffrir autant ? » Merci !

Ma décision est prise. Lundi matin, je n’y vais pas. Moi, le bon petit soldat, je n’ai pas une once de culpabilité, au contraire, je me sens tellement légère de ne pas y aller. Je vais voir mon médecin, je lui explique la situation, le contexte du travail, j'en pleure, je ne lui cache rien de ma souffrance et il comprend : j’ai un arrêt de travail d’un mois, le temps pour moi de trouver une sortie. 

A l’annonce de mon arrêt de travail, le délégué du personnel me contacte. Je lui explique ma souffrance (larmes à nouveau) et ma décision. Il veut m’aider et me propose de m’accompagner à mon retour en poste car « l’équipe a besoin de personnes fortes et volontaires comme [moi] ». Je le remercie pour son aide, mais s’il veut m’aider MOI VRAIMENT, je lui demande de m'aider à trouver une sortie « propre ». Je ne veux pas de son aide si elle consiste à me faire retourner dans cet enfer. Je ne veux plus mettre ma force au service de ce système... même contre rémunération. Il me comprend, il respecte ma décision et il accepte de m’aider MOI. Une rupture de contrat amiable est trouvée.

Voilà, je suis libéréééééééééééééééééééée, délivrééééééééééééééée…

C’est un grand vide dans mon emploi du temps car cette activité me prenait trois jours par semaine. 

Mais la nature a horreur du vide !

J’ai pris la décision de ne plus y retourner un 31 Mars, et je n’y suis plus retournée sauf 30 minutes pour signer ma fin de contrat. L’activité du cabinet sur le mois d'Avril a fait + 40% et cela sans rien faire de différent en termes de communication. Je suis persuadée qu’en quittant volontairement et de manière responsable cet emploi, je me suis remise dans le sens du courant et là, hop, je suis emportée sans produire énormément d’effort. Depuis cet événement puissant je n’ai plus besoin d’activité  «alimentaire » en parallèle. Les mois qui ont suivi ont tenu les promesses d’Avril et l’activité est devenue viable.

Moralité : La vie ne thésaurise pas. Evidemment, cela aurait été plus facile de faire +40% d’abord et décider de quitter le poste ensuite… Mais je ne pense pas que ça se passe dans ce sens-là. 

Je crois viscéralement que la vie est de notre côté. La vie est de notre côté à condition que nous-même soyons de notre côté : le fameux « Aide-toi et le ciel t’aidera » !

Donc quand notre vie est trop difficile, quand il est pénible d’avancer, voire qu’on n’avance plus du tout ou même recule, c’est peut-être qu’on cherche à avancer à contre-courant ? Il est de notre responsabilité de se remettre dans le sens du courant en refusant de coopérer à ce qui nous détruit et en investissant notre énergie dans ce qui nous rend vraiment heureux, et cela que ce soit bénévolement ou contre rémunération. J'avais décidé d'être "humainement utile", donc il fallait que je commence par être cohérente avec moi-même !

Réussir ce qu’on fait ne rend pas forcément heureux.

Faire ce qui nous rend heureux est le chemin de la réussite.